La petite histoire
En 1518, les moines de l’abbaye d’Orval achètent une maison destinée à leur servir de refuge dans le site si bien protégé qu’est Marville.
Les maisons de refuge étaient établies dans des villes entourées de fortifications. Moines et convers s’y retiraient quand leurs installations étaient menacées, voire détruites, ou pour s’y loger lors de leurs déplacements.
Maison-refuge de l'abbaye d'Orval
La façade principale fut reconstruite en 1768. Elle est en retrait par rapport à l’alignement de la rue et homogène sur les deux corps de logis. Par la déclivité naturelle du terrain, le rez-de-chaussée de la rue des Prêtres correspond au premier étage de la façade ouest sur jardin, lui-même en terrasse sur la rue des Tisserands.
Cette façade, donnant sur le jardin, présente, au sud, un important contrefort qui contrebute les façades ouest et sud. Il a été rendu nécessaire par la création de l’ensemble “escalier/ chapelle”, vers le début du XVIe siècle.
L’intérieur du corps de logis sud
Au sud-ouest, la petite chapelle du début du XVIe siècle est à deux niveaux.
. Au rez-de-chaussée la petite pièce de plan barlong est voûtée d’ogives dont les nervures retombent sur des culs-de-lampe feuillagés. Le remplage d’une fenêtre gothique murée fut découvert en 2000 ;
. À l’étage inférieur, la pièce est également voûtée. Les nervures partent d’un oculus zénithal et sont en pénétration directe dans les colonnes. À l’origine cette pièce n’avait pas de porte d’accès.
Ce volume se répète aux étages supérieurs en de petits espaces commandés par les grandes pièces donnant sur l’ouest.
L’escalier en vis, à jour, à limon hélicoïdal, distribue tous les étages depuis la cave jusqu’au grenier, où il semble avoir été arasé. Au rez-de-chaussée, la cheminée de la pièce principale présente une taque qui, bien que n’étant pas d’origine, s’adapte en date. C’est une taque de l’abbé d’Orval Étienne Scholtus (1764-1787) datée de 1768, date que l’on retrouve étonnement sur l’actuelle porte d’entrée. Derrière cette cheminée, se trouve le traditionnel placard chauffant avec deux niches en pierre, surmontées d’une corniche moulurée.
Sur le mur ouest de la cuisine, le fameux “accroupi de Marville” : corbeau à sculpture rabelaisienne qui supporte une des poutres du plafond. Au sol, une descente vers le niveau inférieur de l’aile sud, qui fut dallé, donnait certainement accès au jardin.
Dans le salon, les deux ouvertures sur le jardin, transformées au XVIIIe siècle, sont séparées par un trumeau où est insérée une colonne avec base et chapiteau sculptés. On accède à la chapelle par deux marches, à gauche de ce mur.
Au premier étage, à l’ouest, dans une grande pièce, on lit encore les traces d’une cheminée disparue, remplacée par une élégante cheminée du XVIIe siècle, finement moulurée. Les deux poutres du plafond à la française sont décorées, l’une d’une spirale à chaque extrémité, l’autre d’un décor dans le même esprit mais très géométrique. Elles sont datées par dendrochronologie de 1512.
Le corps de logis nord
Son rez-de-chaussée a subi de nombreuses modifications : notamment, l’important escalier central a été supprimé au profit de l’ancien escalier droit en bois situé à l’extrémité nord. À l’ouest, une élégante petite cheminée du XVIIIe siècle a été conservée et les traces des anciennes portes donnant accès à la partie sud du bâtiment sont encore visibles. Les lambris de hauteur du XVIIIe siècle ont disparu, tout comme ceux de l’étage mais les cloisons gardent trace des tressages de bois supportant le torchis. Un grand espace occupait le premier étage, maintenant divisé en chambres, où l’on peut encore voir plusieurs culots sculptés supportant les poutres des combles actuels.
C’est dans cet espace qu’auraient pu se tenir les Assises des Hauts-Jours qui rythmaient la vie administrative de la coseigneurie des Terres Communes de Marville et d’Arrancy.
Les caves
Malgré les divisions réalisées au cours des siècles, l’unité du bâtiment se lit dans les sous-sols. En descendant l’escalier en vis, on passe devant la petite pièce située sous la chapelle et on arrive dans une grande salle où une cheminée, construite en pierres équarries et dont le modèle a été utilisé du XIIe au XVe siècle, fait face à la base de la tour “escalier-chapelle”.
Cette première cave a pu être datée de 1268 grâce à une étude dendrochronologique des poutres du plafond. À l’est, la cave voûtée en berceau soutenu par des arcs doubleaux donne accès, par un sas, à une cave en contrebas qui rejoint la cour par un boyau.
Enfin, près de la cheminée, un accès débouche sur une écurie qui s’étend sous le bâtiment nord. Des poutres sculptées, représentant un loup et un putto de part et d’autre d’un cartouche ont aujourd’hui disparu.
Dans cette cave sous plancher, des poteaux supportent deux poutres reliées par un trait de Jupiter. Les autres caves, voûtées en berceau, sont reliées par un boyau lui aussi en berceau.
D’autres caves sont situées sous la cour avant de la maison-refuge.
À savoir
La maison de Marville n’est plus citée comme possession d’Orval après 1730. L’ensemble du refuge d’Orval est aujourd’hui unifié.